L'usine du futur

Notre centre de production de tracteurs est implanté au Mans, une cité située dans le nord-ouest de la France. Chaque année, 10 000 machines configurées selon les besoins des clients sortent de ses chaînes. Depuis la campagne de modernisation « CLAAS Forth », l'usine du Mans est devenue non seulement le symbole de la transposition réussie du concept d'industrie 4.0, mais aussi un modèle en termes d'implication des employés dans des projets d'envergure.

L'Homme au centre des préoccupations

Depuis vingt ans, CLAAS produit la plupart de ses tracteurs au Mans, en France, où son usine n'a cessé d'évoluer au fil du temps

Lire l'article

L'usine est différente des autres, c'est ce que Romane Niepceron apprécie le plus au Mans : « Ici, on travaille dans une ambiance familiale », déclare la jeune opératrice de 27 ans. Pourtant, l'usine CLAAS du Mans de type industrie 4.0 n'a rien d'un cocon douillet avec ses 70 000 m² de surface de production couverte, ses 1 000 employés et ses 10 000 tracteurs produits chaque année.

Pourquoi l'ambiance est-elle malgré tout si familière ? Pour Romane Niepceron, cela est lié à l'environnement de travail : « De par sa clarté et son niveau sonore réduit, l'usine offre des conditions de travail agréables », explique l'opératrice. « Et il y a beaucoup d'espace pour évoluer librement. »

« Chez CLAAS Tractor, nous avons à cœur de travailler en équipe à la satisfaction de nos clients. Associés à notre engagement, les technologies et équipements de pointe dont nous disposons supportent notre démarche vers la qualité premium. »

– Alexandre Lanson, responsable SFQuality

« La satisfaction de nos clients étant primordiale, nous travaillons pour intégrer leurs exigences en amont de nos projets. Ainsi, par un travail en partenariat avec les équipes R&D et achats, nous sommes de plus en plus exigeants sur le choix de nos fournisseurs afin de maximiser la qualité des pièces que nous recevons. »

– Marion Tourneur, ingénieure qualité, responsable fournisseurs projet

« Dans mon travail, ce qui est important pour moi, c’est de comprendre les attentes des opérateurs, et, avec du bon sens, de la créativité et du pragmatisme, trouver ensemble des solutions limpides et innovantes. »

– Fabrice Portebœuf, chef de projet Industrialisation

Une transformation sans interruption d'activité

Cela n'a pas toujours été comme ça. Avant 2017, l'usine ressemblait à de nombreux autres centres de production de tracteurs. Elle était sombre et exiguë, comme un atelier automobile grand format. Les infrastructures techniques de l'usine, qui avaient été reprises en 2003 d'un autre constructeur, devaient elles aussi être rajeunies.

Le projet « CLAAS Forth » avait pour but de moderniser le site et de parvenir à assembler les tracteurs avec un taux d'erreurs le plus faible possible selon le principe « first time right ». Programmée sur trois ans, la transformation, qui a nécessité un investissement de 40 millions d'euros, a porté non seulement sur la modernisation des équipements techniques, mais aussi sur la redéfinition de processus entiers comme le système logistique interne ou les installations de remplissage de différents liquides pour les machines.

La principale difficulté a été de devoir mener le projet sans interruption de l'activité, hormis la pause estivale de quatre semaines de l'usine au cours de laquelle les travaux de transformation ont pu être exécutés sans tenir compte des contraintes de la production. Cela signifie que la majorité des travaux de modernisation ont été intégrés dans le quotidien de l'usine.

La planification des travaux s'est avérée particulièrement difficile étant donné que la production de tracteurs n'est pas une production de masse classique, même si 50 tracteurs sortent chaque jour des chaînes de l'usine. En effet, chaque machine est fabriquée sur commande et ce, sur la base de cinq gammes de produits couvrant un segment de puissances de 72 à 460 ch. Le nombre d'options de configuration est si élevé que, sur une période de trois mois, seuls deux tracteurs identiques sont susceptibles d'être produits.

Une planification assistée par ordinateur et des convoyeurs sans conducteur

Trois facteurs ont été déterminants pour la réalisation du projet. Tout d'abord, la transformation a été planifiée sur ordinateur. « Pour cela, nous avons commencé par modéliser en 3D l'ensemble de l'usine et des bâtiments connexes », explique Aldric Pavec, Head of Process Engineering au Mans. Âgé de 57 ans, c'est lui qui a piloté la phase de planification du projet « CLAAS Forth ». « Nous avons donc simulé sur ordinateur tout le processus de transformation et, à l'aide d'animations en 3D et de lunettes de réalité virtuelle, testé en direct sur site comment optimiser encore certains processus en termes d'efficacité. »

Le second facteur déterminant a été la suppression de la chaîne et son remplacement par des convoyeurs sans conducteur. Ces robots sont capables de transporter des tracteurs jusqu'à 20 t le long de la ligne d'assemblage d'une longueur de 1,2 km et ce, selon un séquencement paramétrable et de manière entièrement automatique, du premier au dernier poste d'assemblage.

Grâce à des capteurs sur leur partie avant, les robots peuvent freiner automatiquement dès que des obstacles se présentent devant eux. Ainsi, les collaborateurs peuvent circuler en toute sécurité entre les convoyeurs.

La suppression de la chaîne a permis de récupérer de l'espace utilisable pour d'autres travaux de transformation. Parallèlement, grâce aux convoyeurs sans conducteur, la production a gagné en flexibilité, un autre bienfait au profit de « CLAAS Forth ».

Un projet participatif

Le troisième élément décisif, et peut-être le plus important, a été l'implication des collaborateurs dans le projet. « Nous voulions exploiter la transformation pour rendre le quotidien des collaboratrices et des collaborateurs vraiment plus agréable », explique Aldric Pavec, Head of Process Engineering. « Ils connaissent le processus d'assemblage sur le bout des doigts. Il paraissait donc essentiel à nos yeux qu'ils soient totalement impliqués dans le projet. »

Cela explique pourquoi seuls quelques consultants externes ont été mandatés pour accompagner le projet. L'équipe de base était composée de 50 collaborateurs, dont des ingénieurs, des opérateurs sur chaîne et des apprentis. Les services Contrôle de gestion, Ressources humaines, Achats, Logistique et R&D y étaient également représentés.

Les collaborateurs ont eu voix au chapitre dans toutes les phases du projet, jusqu'à choisir le nom-même du projet : « CLAAS Forth ». Une fois par semaine, un « forum CLAAS Forth » était organisé au Mans. Ouvert à toutes et tous, il servait à informer le personnel des évolutions et des motifs de ces changements. Enfin, les collaborateurs ont été formés régulièrement afin de savoir comment mettre en œuvre les nouvelles structures.

Il m'arrive régulièrement de voir les opérateurs faire des selfies dans l'usine.

De multiples éléments du concept industrie 4.0

Comme le confirme Romane Niepceron, l'implication des collaborateurs a été payante. Elle est responsable du remplissage des chariots qui viennent se coller aux convoyeurs par voie magnétique et permettent d'amener sur la ligne les vis et autres petites pièces nécessaires à l'assemblage de chacun des tracteurs.

Autrefois, Romane Niepceron avait besoin d'une longue liste pour sélectionner les pièces à déposer dans le chariot. Aujourd'hui, elle les trouve en scannant les codes-barres avec ses gants sur les rayonnages. Si une lampe s'allume sur l'un des compartiments, elle sait qu'elle trouvera là la pièce ou l'élément qu'elle doit déposer dans le chariot pour l'assemblage de la machine.

Ce système n'est qu'un des innombrables éléments du concept industrie 4.0 intégrés dans la conception de l'usine moderne. Des outils connectés aident les collaborateurs à exécuter des tâches multiples telles que la réception des commandes ou les contrôles par listes. Le système de rayonnages gigantesque a été remplacé par un magasin de petites pièces automatisé peu encombrant.

Les assistants numériques ont démontré leur utilité. Le nombre de cas où une erreur d'assemblage mineure doit être corrigée lors des étapes suivantes du processus de production a diminué substantiellement : de 200 à moins d'une par jour. Et ce, pour des milliers de pièces utilisées chaque jour sur les chaînes d'assemblage du Mans.

L'équipement technique du site a également séduit l'État français qui lui a décerné le label « Vitrine Industrie Du Futur ».

« Un mélange de fierté et de confiance. »

Dans un entretien, Étienne Bourasseau, le directeur du site, retrace l'évolution du centre de production de tracteurs du Mans.

Entretien avec Étienne Bourasseau

250 tonnes de peinture

Le nouvel environnement de travail plus chaleureux a également été conçu sur la base de suggestions des collaborateurs. Tous les murs et les plafonds ont été peints en blanc. Il a fallu pour cela près de 250 t de peinture ! Les sols ont quant à eux été peints dans un ton gris clair. Avec l'éclairage à LED, les collaborateurs travaillent donc dans des conditions de clarté proches de la lumière du jour.

Parallèlement, le niveau sonore a été réduit dans l'usine grâce à différentes mesures d'insonorisation. Ainsi, les revêtements de sol ont été posés de sorte à diminuer le niveau de bruit des véhicules servant à la logistique. De même, les visseuses pneumatiques ont été remplacées par des versions électriques, plus silencieuses. « Récemment, nous avons eu la visite d'une responsable d'une entreprise spécialisée dans les semi-conducteurs », raconte Aldric Pavec. « Elle avait du mal à croire qu'il était possible de construire des tracteurs dans une ambiance aussi calme et dans un environnement aussi propre. »

Les évolutions rencontrent également un écho très positif auprès du personnel. « Les collaborateurs sont très fiers de leur usine modernisée », explique Étienne Bourasseau, le directeur du site. « On entend souvent qu'ils s'y sentent désormais vraiment bien chez eux. Cela a amélioré encore la culture de travail. Il m'arrive régulièrement de voir des opérateurs faire des selfies dans l'usine. »

Aldric Pavec le confirme : « Récemment, nous avons organisé des entretiens d'embauche pour recruter de nouveaux opérateurs », raconte le responsable. « La plupart des candidates et des candidats avaient déjà travaillé dans d'autres usines au Mans. Ils nous ont raconté que notre usine était aujourd'hui considérée au Mans comme le meilleur endroit où travailler. »

Une journée de travail au Mans

Poursuite de « CLAAS Forth »

Le succès de « CLAAS Forth » auprès des collaborateurs est tel que le projet se poursuit à un autre endroit dans l'usine. En effet, l'atelier d'assemblage des cabines de tracteurs est lui aussi en travaux depuis février 2021 pour subir une cure de jouvence et ce, à l'initiative des collaborateurs.

Le projet « Cabin Optimization Project » est dirigé par Gilles Drouyer. « Pour sa réalisation, nous nous inspirons fortement de 'CLAAS Forth' », explique le jeune ingénieur de 30 ans qui a rejoint CLAAS il y a cinq ans. « L'implication des collaborateurs dans la planification est un facteur décisif à nos yeux. »

Cela explique pourquoi deux opérateurs sont membres à part entière de l'équipe projet. Jérémy Legendre est l'un deux. Le jeune homme, qui travaille à la production, apprécie sa nouvelle mission. « Il est intéressant de voir l'activité normale sous une autre perspective », explique-t-il.

L'échéance du projet « Cabin Optimization Project » est prévue pour 2023. « Je me réjouis de voir à quoi ressemblera le nouveau design de notre partie de l'usine », annonce Jérémy Legendre.

À l'instar de « CLAAS Forth », le projet de Gilles Drouyer et Jérémy Legendre a pour but de préparer l'usine pour le futur, sachant que le groupe prévoit d'y faire passer la production annuelle de 10 000 tracteurs actuellement à 13 000 unités dans les prochaines années.

Romane Niepceron se réjouit de l'évolution à venir. Âgée de 27 ans, la jeune collaboratrice travaille à l'usine du Mans depuis cinq ans. Récemment, elle a été promue spécialiste de la mise en service de pièces et d'organes. « L'usine est un endroit parfait pour évoluer professionnellement », déclare la jeune spécialiste qui voit là un autre argument en faveur de l'usine.

L'usine du Mans en cinq faits et chiffres

1.

Le Mans est la préfecture du département de la Sarthe, dans la région des Pays de la Loire, dans le nord-ouest de la France. Elle est située à environ 200 km au sud-ouest de Paris. Avec une population de 146 000 habitants intra muros et de 201 000 habitants dans son agglomération, la ville du Mans est la 20e ville la plus peuplée de France.

2.

Le Mans et Paderborn, siège de CLAAS Industrietechnik, sont liées par le jumelage inter-villes certainement le plus ancien d'Europe. En effet, c'est en 836 qu'Aldric, évêque du Mans, et Badurad, évêque de Paderborn, ont conclu une « fraternité éternelle » entre les deux diocèses. Cette décision fait suite au transfert des ossements d'un saint, lors d'une procession fastueuse en cette même année 836, du Mans vers Paderborn, qui ne possédait pas de reliques.

3.

La cité est connue mondialement pour sa célèbre course automobile des 24 Heures du Mans. Organisée chaque année à la mi-juin depuis 1923, la compétition se déroule partiellement sur la voie publique, fermée à la circulation pour l'occasion. La veille de la course, les pilotes participent à un défilé qui permet aux spectatrices et aux spectateurs de faire leur connaissance et de découvrir leurs bolides.

4.

La « FFSA Academy » a été implantée au Mans pour former des pilotes de course. Trois de ses élèves ont remporté les célèbres 24 Heures, à savoir Romain Dumas, Benoît Tréluyer et Marcel Fässler.

5.

L'agriculture est le premier employeur du département de la Sarthe. Le secteur économique y est représenté dans toute sa diversité, de l'élevage à la production viticole, en passant par l'industrie agroalimentaire, les pépinières et le maraîchage. L'industrie automobile est le second employeur de la région.

Impressions